Une entente entre le gouvernement fédéral et une agence internationale est faux pas inquiétant dans l’important travail de recherche de nos enfants disparus
Le Centre national pour la vérité et la réconciliation est profondément préoccupé par le fait que le gouvernement fédéral ait choisi de confier à une agence internationale la responsabilité de mener à bien un processus de mobilisation extrêmement délicat même si cette agence n’a aucune expérience de travail antérieure auprès des communautés des Premières Nations, métisses et inuites ou aucune compréhension du système des pensionnats.
Aux termes de l’accord technique qui a été rendu publique le 17 février, le gouvernement fédéral a retenu les services de la Commission internationale des personnes disparues (CIPD), dont le siège social est situé aux Pays-Bas, « pour engager le dialogue avec les communautés autochtones concernant les options relatives à l’identification et au rapatriement des enfants disparus ».
« Combien de fois faudra-t-il répéter que rien ne se passe sur nous, sans nous ? » a déclaré Eugène Arcand, membre du Cercle des survivants de la CNVR. « Nous avons besoin d’un processus de guérison, et non de quelque chose qui traumatise davantage les survivants et leurs familles et nos communautés. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement fédéral confierait un processus aussi délicat à une agence qui ne dispose pas des compétences culturelles nécessaires. »
Des rumeurs circulent depuis des semaines au sujet de la participation possible de la CIPD à la recherche d’enfants disparus des pensionnats indiens. Bien que l’accord technique soit axé sur un processus de mobilisation pour éclairer les futures initiatives du gouvernement fédéral, des attentes ont été créées au sein de certaines communautés autochtones qui croient qu’elles recevront un soutien direct en matière d’enquête de la part de la CIPD. L’annonce fédérale a ajouté à la confusion en insistant sur les avantages pour les communautés autochtones plutôt que sur le fait que l’accord, tel que rédigé, vise principalement à conseiller le gouvernement fédéral.
« Il y a eu un manque flagrant de transparence et de clarté autour de la décision du Canada de retenir les services de la CIPD. Cette décision est profondément injuste et nuisible aux survivants et aux communautés. Malheureusement, après avoir pris connaissance des modalités de cet accord, cela ne fait que soulever encore plus de questions », a déclaré Stephanie Scott, directrice générale du CNVR.
En vertu de l’accord technique, la CIPD est tenue d’organiser une table ronde d’experts, deux « assemblées publiques » nationales et près de 35 séances de mobilisation régionales avant de faire rapport, en juin, de ses conclusions et recommandations au gouvernement fédéral. Dans le cadre de ce processus, la CIPD doit embaucher des facilitateurs autochtones pour « veiller à ce que les besoins spirituels et cérémoniels soient satisfaits ». Dans le cadre de son mandat, la CIPD devra partager « son expertise et des renseignements sur toutes les questions liées à l’identification, au rapatriement et à l’analyse de l’ADN ».
Membre du Cercle dirigeant Cynthia Wesley-Esquimaux a déclaré : « Depuis la Commission de vérité et réconciliation du Canada, il y a une entente claire que tout travail lié aux préjudices causés par le système des pensionnats doit être dirigé par des peuples autochtones et que les survivants doivent être au cœur de ce travail. Confier le processus de mobilisation prévu entre les mains d’une ONG non autochtone est un faux pas très inquiétant.
« Nous sommes tous d’accord pour dire qu’une intervention nationale cohérente est nécessaire dans la recherche de nos enfants disparus. Le CNVR s’est engagé à travailler avec les survivants, les familles, les communautés, les organisations partenaires et les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux sur cette initiative sacrée. Malheureusement, le gouvernement fédéral n’a pas eu recours aux bonnes ressources pour développer son processus de mobilisation. Il faut se soucier davantage de la santé et du bien-être des survivants et de leurs familles et veiller à ce que toute stratégie future respecte les lois et protocoles, l’expertise et le pouvoir décisionnel des peuples autochtones », a déclaré Stephanie Scott.
Après avoir reçu une copie de l’entente entre le Canada et la CIPD, le CNVR a fait part de ses préoccupations lors d’une réunion avec le ministre Marc Miller et partagera ses recommandations quant aux mesures visant à respecter les droits et la sécurité des familles et des communautés concernées qui seront touchées par ce processus.